Blog

L’UFE et l’ADEME publient un rapport sur le futur du marché des GO en France

L’ADEME (agence de la transition écologique) et l’UFE (Union Française de l’Electricité) ont récemment publié une étude sur l’évolution de l’offre et la demande en Garanties d’Origine (GO) en France au niveau national et par région de production.

D’après cette étude la demande de GO en France est de 33 TWh pour 53 TWh offerts en 2018. La demande est donc nettement inférieure à l’offre.

Le rapport propose ensuite une modélisation du marché de la GO en France, basé sur trois scénarios :

  • Un scénario de référence basé sur le développement actuel de la consommation d’électricité verte, c’est-à-dire une augmentation de 10%/an pour atteindre 18% de la consommation totale en 2028.
  • Un scénario vert supposant une consommation d’électricité verte correspondant à 45% de la consommation totale en 2028.  Ici, la totalité de la production d’électricité verte française serait consommée en France.
  • Un scénario médian situé entre le scénario de référence et le scénario verte où la consommation d’électricité verte serait de 30% en 2028.

L’étude s’appuie sur plusieurs postulats concernant la production et la consommation d’électricité verte. Elle ne prend par exemple pas en compte les imports-exports des GO et part ainsi du principe que les consommateurs en France ont une préférence pour les GO françaises. En conséquence, l’étude ne prend pas en considération le caractère arbitrable des GO françaises avec des GO européennes. Ce choix de limiter l’étude au périmètre national permet de simplifier l’analyse mais risque de dénaturer l’interprétation des résultats statistiques.

Ce postulat n’est pas négligeable car ni les consommateurs, ni les fournisseurs, n’ont pour le moment montrer de signaux évidents de préférences pour les GO françaises par rapport aux GO européennes. L’interprétation des résultats peut donc être biaisée.

Les résultats de cette étude montrent que le scénario de référence ne connaîtra que très peu de tensions sur le marché (demande > offre). Ces tensions apparaitraient pour l’énergie solaire qui ne pourrait pas répondre à la demande si la moitié des consommateurs demandent à consommer de l’électricité d’origine solaire, de même pour les bioénergies. Toujours avec ce scénario de référence, seule la région Ile-de-France est aussi sujette à des tensions si la moitié des consommateurs ont une préférence pour des GO de leur région.

Evolution de l’offre et de la demande pour le scénario de référence (source : UFE-ADEME)

Le scénario vert, lui, prévoit des tensions pour toutes les sources d’énergies, la production hydraulique ne pouvant plus répondre à la demande à partir de 2024. Selon l’ADEME et l’UFE, plusieurs régions seraient concernées : l’Ile-de-France, la Normandie, les Pays de la Loire, les Hauts-de-France, la Bourgogne Franche-Comté et la Bretagne.

Evolution de l’offre et de la demande pour le scénario vert (source : UFE-ADEME)

Le passage à l’annulation des GO au pas mensuel à partir de 2021 en France peut aussi avoir quelques conséquences sur l’équilibrage offre/demande selon l’étude. Néanmoins cette interprétation se heurte à la réalité de la réglementation européenne. Le pas mensuel n’est obligatoire dans aucun pays sauf la France. En conséquence, faute de préférence pour les GO françaises, il est aisément faisable d’obtenir des profils mensuels de GO européennes car les producteurs européens ne subissent aucune pression à cet égard.

Pour conclure, ce premier rapport présente les différentes tensions qui pourraient exister en fonction de plusieurs facteurs. Il est à noter que l’ADEME et l’UFE précisent bien que cette étude réalisée sur un marché naissant nécessite d’être complétée. Une seconde étape serait d’inclure le scénario de l’évolution de la demande et de l’offre de GO françaises dans le périmètre européen qui peut en réalité générer davantage de tension sur le marché national. En effet, la demande européenne croit rapidement et pourrait soutirer une part importante des GO françaises pour de la demande dans d’autres pays. La GO pourrait ainsi atteindre un prix permettant davantage de signaux d’investissement dans les énergies renouvelables et ce à l’échelle européenne.

Les trois dimensions essentielles à un système de traçabilité d’électricité d’origine renouvelable

Marko Lehtovaara, CEO de Grexel, a récemment écrit un ensemble d’articles sur les différents aspects d’un système de traçabilité de l’énergie renouvelable. Il existe trois grands systèmes dans le monde, appelés des EAC (Energy Attribute Certificate) : la Garantie d’Origine (Europe), les I-RECs (International), les RECs et systèmes nationaux (Amérique du Nord, Australie, Japon). Marko Lehtovaara évoque les dimensions d’unicité, de régulation et d’additionalité de ces systèmes. Son discours est très pertinent. Nous vous proposons donc une synthèse de ses publications.  

L’unicité[1]

L’unicité d’un EAC est définie par le caractère unique du certificat pour un MWh. Elle pourrait être remise en cause dans deux situations : lors d’un double comptage explicite et implicite.

Le double comptage explicite se manifeste si le MWh associé à l’EAC est vendu à une autre personne sous la forme d’un autre EAC, d’un PPA, ou autre produit premium. Mais les systèmes des GOs, RECs et I-RECs sont suffisamment solides et légiférés pour ne pas être trop inquiétés par ces situations.

Le risque de double comptage explicite éliminé, reste alors le risque de double comptage implicite. Il se manifesterait lorsqu’un consommateur prétend consommer de l’électricité verte sans avoir acheter lui-même d’EAC. Cela serait dû à trois scénarios :

  • La double divulgation correspond à la publication du mix énergétique d’un fournisseur auprès de ses clients prenant en compte les MWh associés aux EAC vendues à d’autres clients. Ce problème pouvait apparaître dans certains pays européens.  
  • Un mauvais mix résiduel national peut aussi parfois apparaître lorsque certains EAC ne sont pas retirés du mix après annulation, exportation ou transfert. Il s’agit principalement d’erreurs de calcul. Ces erreurs, si elles existent, sont minimes.
  • Lorsque le mix de production est composé en grande partie d’énergies renouvelables et que le consommateur va donc estimer consommer ce mix de production et non le mix résiduel. Il s’agit ici d’une simple supposition du consommateur basé sur son lieu de consommation. Notons que cette méthode dite « location based » a l’avantage d’exister dans des zones ne bénéficiant pas de système de traçabilité mais qu’elle est encore malheureusement reconnue par le GHG Protocol dans les zones où ces mécanismes existent.

En restant vigilant sur ces points, les consommateurs peuvent s’assurer de l’unicité des EAC et consommer de l’électricité d’origine renouvelable grâce à ces systèmes.

La réglementation[2]

Pour qu’un consommateur puisse avoir confiance en un système de traçabilité, il faut que ce système soit légiféré et réglementé.

Marko Lehtovaraa nous explique qu’il existe deux types de schémas légaux : contractuels et réglementaires. Les schémas contractuels, tels que les I-RECs, permettent à n’importe quel Etat de s’inscrire volontairement au régime en signant des règlements standards et de les suivre. Les schémas réglementaires comme les GO, sont soumis aux directives et lois nationales. C’est-à-dire que chaque pays pourra encadrer différemment le système. Par exemple, les Pays-Bas ont décidé d’employer le full disclosure, au contraire d’autres pays Européens.

Du point de vue du consommateur, le plus important est de vérifier :

  • La crédibilité : le certificat est-il reconnu pour la consommation d’électricité verte dans mon pays ?

L’exclusivité : le système de traçabilité est-il bien ’unique moyen de prouver une consommation d’électricité verte ?[3]


Les EAC sont des certificats suffisamment encadrés et réglementés pour rassurer les consommateurs sur ces critères.

L’additionnalité[4]

L’additionnalité d’un produit correspond au fait qu’il contribue au développement permettant la transition énergétique. Les EAC peuvent-ils être considérés comme additionnels ?

Le principe des EAC est de valoriser l’origine d’une énergie en permettant de mieux rémunérer celle-ci. L’additionnalité de cet outil existe si la demande engendre une pression pour que le réseau soit davantage alimenté en énergies respectueuses de l’environnement. Une demande élevée permet aux EAC d’atteindre une valeur monétaire incitant à la naissance et au maintien de nombreux projets d’EnR. L’achat et l’annulation d’un EAC est alors un surplus et donne des signaux d’investissement au marché. L’Espagne, par exemple, développe un grand nombre de projets non-subventionné grâce au mécanisme des Garanties d’Origine. Si plus personne ne demande d’électricité d’origine renouvelable, les projets restent dépendants des subventions et ne peuvent pas exister dans un pays où le gouvernement n’y est pas favorable.

L’achat d’EAC permet la réduction d’émission de CO2. La valeur d’additionnalité collective peut donc lui être attribuée.

Marko Lehtvorra conclue sa série d’articles en incitant les entreprises à ne pas perdre de temps à s’assurer si tel certificat est unique, régulé et additionnel. En effet, si le système est bien fait comme les GO, REC et I-REC, la question ne se pose pas. Si l’entreprise est dans un pays où le système n’est pas encore mature, l’objectif est avant tout de demander de l’énergie renouvelable et d’acheter des certificats. Le système sera par la suite plus rigoureux.

Découvrez les 4 articles :

https://grexel.com/can-i-green-x-with-certificate-y/

https://grexel.com/can-i-green-x-with-certificate-y-2/

https://grexel.com/can-i-green-x-with-certificate-y-3/

https://grexel.com/can-i-green-x-with-certificate-y-additionality/


[1] https://grexel.com/can-i-green-x-with-certificate-y-2/

[2] https://grexel.com/can-i-green-x-with-certificate-y-3/

[3] Ne pas confondre unicité (1 MWh = 1 seul EAC) et exclusivité (1 zone géographique = 1 seul système de traçabilité).

[4] https://grexel.com/can-i-green-x-with-certificate-y-additionality/

Conséquences du Covid-19 sur le marché des Garanties d’Origine

Comme pour beaucoup d’autres marchés, l’épidémie du Covid-19 a un impact sur celui de l’électricité. Le niveau de consommation électrique a naturellement chuté en raison de l’arrêt ou le ralentissement des diverses industries. Mais qu’en est-il du marché de l’électricité d’origine renouvelable ?

Selon RTE, la consommation était pour le mois de mars en moyenne inférieure de 15% à la suite des mesures de confinement.[1] La baisse sur le mois d’avril sera nettement supérieure, ce mois étant intégralement soumis au confinement en France ainsi que dans la majeure partie des pays européens.

À court terme, le prix minimum des Garanties d’Origine européennes continue sa baisse. Ce prix correspond à une Garantie d’Origine sans demande de qualité particulière quant au pays de production, technologie, date de mise en service ou association à un label. Le prix de l’année 2020 a atteint un plancher sous la pression des enchères françaises qui inondent l’Europe. Au cours des premières enchères relatives aux GO de production 2020, l’intégralité des volumes a été vendue à un prix moyen de 0,22€/MWh.

La baisse de la consommation n’engendre pas automatiquement une baisse de la production électrique issue d’énergies renouvelables car celles-ci sont les premières sollicitées, suivies par l’énergie nucléaire, grâce à leur coût marginal nul. Les émissions de Garanties d’Origine ne sont donc pas affectées par une baisse de la production électrique. En revanche, la demande en Garanties d’Origine devrait être significativement touchée du fait de la baisse de consommation des entreprises engagées dans l’achat responsable d’électricité. Les entreprises auront de fait besoin de moins de GO pour couvrir leur consommation d’électricité.

À ce stade, la crise sanitaire a eu un effet sur les prix à moyen terme. Ceux-ci étaient restés relativement élevés malgré la baisse des prix spot du fait d’une hausse significative de la demande et d’un volume d’offre relativement stable année après année.

Depuis le début de la crise, le prix de la GO 2023 perdu 30% de sa valeur et atteint actuellement péniblement les 40 centimes d’euros par MWh. Ce prix particulièrement attractif engendre une augmentation des intérêts à l’achat. A moyen terme le risque n’est pas tant la baisse de consommation électrique. Néanmoins, si la majorité des entreprises considèrent sérieusement leur engagement d’un achat responsable en choisissant les énergies renouvelables, il est à craindre que les conséquences économiques de la crise sanitaire amènent une baisse d’engagement de la part de certaines d’entre elles.

Pour finir sur une note optimiste, la situation actuelle est l’occasion pour les entreprises de repenser leurs priorités et leurs stratégies. Il est probable que leurs parties prenantes soient davantage attentives à cela. L’heure est à l’économie durable et responsable, et cela passe par la consommation volontaire d’électricité de source renouvelable.


[1] https://www.rte-france.com/actualites/covid19_quels_impacts_sur_la_consommation_electricite

Le full disclosure : définitions et avis

RECS International a récemment donné son avis sur la pratique du full disclosure. L’organisation en profite pour présenter les différents types de full disclosure à disposition et ainsi préciser les bonnes définitions.

Qu’est-ce que le full disclosure ?

Le full disclosure est l’utilisation du mécanisme des Garanties d’Origine pour toutes les technologies de production d’électricité, de source renouvelable ou non renouvelable. Les Garanties d’Origine sont habituellement utilisées pour prouver la production ou la consommation d’électricité d’origine renouvelable mais elles peuvent aussi être utilisées pour les autres énergies. RECS international précise que la pratique du full disclosure peut être proclamée par un pays seulement si celui-ci rend obligatoire le recours aux GO pour toutes les énergies mais qu’il ne peut le faire s’il le laisse optionnel.

Il existe trois types de full disclosure :

  • Le Full Production Disclosure (FPD) concerne comme son nom l’indique les producteurs d’électricité. Le principe est simple, chaque MWh d’électricité injecté dans le réseau engendre l’émission d’une Garantie d’Origine. Ce système n’oblige pas les consommateurs finaux à choisir et prouver l’origine de l’électricité qu’ils consomment via l’utilisation de Garanties d’Origine. En cas de péremption, elles sont attribuées au mix résiduel qui s’applique aux consommateurs choisissant de ne pas utiliser de Garanties d’Origine.  
  • Le Full Consumption Disclosure (FCD) procède de la même manière pour la consommation. Chaque MWh soutiré du réseau engendre l’obligation d’utiliser une Garantie d’Origine. Dans ce cas, chaque consommateur peut donc choisir de consommer une énergie d’origine renouvelable mais aussi nucléaire ou fossile. La décision viendra de lui et non pas de l’attribution par défaut d’un mix résiduel.
  • Le Full Supplier Disclosure (FSP) est le même principe que le FCD mais il s’applique au sein de pays ayant une réglementation limitante le monopole de l’utilisation de de Garanties d’Origine aux fournisseurs d’électricité.

RECS International soutient et recommande la pratique du full disclosure. En effet, cela obligerait les consommateurs à se questionner sur l’origine de leur consommation électrique. Ils n’auraient plus à faire d’efforts de procédures pour avoir accès à l’électricité verte et ne serait plus soumis par défaut au mix résiduel. Les énergies renouvelables se retrouveraient alors sur le même pied d’égalité que les autres technologies.

En France, 94% des Français sont favorables au développement des énergies renouvelable selon un sondage d’OpinionWay[1]. Il n’y a pourtant que 12,9% (2020) de consommation volontaire d’électricité verte dans le pays. Le full disclosure permettrait d’augmenter considérablement ce pourcentage et ainsi engager concrètement la transition énergétique dans le pays. Aujourd’hui, l’Autriche, la Suisse et plus récemment les Pays-Bas sont les trois seuls pays à utiliser le full disclosure. Dans ces pays, la consommation d’électricité verte via les Garanties d’Origine atteint respectivement 83,9%, 70,8% et 55,6%, en 2020 ![2] L’impact n’est donc plus à prouver.

Source : Origo

[1] https://www.connaissancedesenergies.org/sites/default/files/pdf-actualites/Enqu%C3%AAte%20Environnement%20vague%206%202019.pdf

[2] Ces pourcentages ont été calculés à partir des données de l’AIB disponibles ici : https://www.aib-net.org/sites/default/files/assets/facts/residual-mix/2020/AIB_2020_Residual_Mix_Results.pdf


Crédit photo : AB Electrical & Communications Ltd

Bilan des transactions de GO sur l’année 2019

L’AIB (Association of Issuing Bodies) a publié dernièrement son rapport trimestriel sur le traitement des Garanties d’Origine (GO) par ses membres. Le dernier rapport nous permet d’avoir les résultats complets de l’année 2019. Plus de 570 TWh de Garanties d’Origine d’énergies renouvelables ont été annulées par les membres de l’AIB, soit 50 TWh de plus que l’année 2018. Aujourd’hui, l’AIB est constituée de 27 pays européens. Certains pays ne sont donc pas inclus dans ces statistiques, tels que le Royaume-Unis et la Pologne.

Quels pays ont participé à l’augmentation du nombre de GO annulées ?

Source : Origo via AIB

Comme nous pouvons le voir sur le graphique ci-dessus, certains pays participent grandement à l’augmentation de la demande de GO. De fait, la demande en électricité d’origine renouvelable en Norvège et en Suède a respectivement augmenté de 28% et 26% entre 2018 et 2019. L’annulation de GO en France et en Allemagne est aussi nettement en hausse, de même en Ireland. Certains pays ont plus ou moins stagné comme la Suisse, le Danemark, la Finlande, l’Islande, l’Italie et le Luxembourg. En revanche, l’utilisation de GO en Espagne est en chute libre avec une baisse d’environ 12,7%. Cette tendance est malheureusement contraire aux signaux verts donnés par le pays concernant les nombreux projets de production d’électricité verte sans-subvention. L’Autriche, la Belgique et les Pays-Bas sont aussi en légère baisse. Les Pays-Bas, tout comme la Norvège et la Suède, restent toutefois plus demandeurs de GO que la France malgré une consommation électrique totale nettement inférieure. La France représente en effet que 8% de toutes les GO annulées par l’ensemble des membres de l’AIB en 2019. À partir de sa consommation d’électricité totale, elle devrait se classer parmi les pays les plus demandeurs comme l’Allemagne ou l’Espagne en 2018. Il y a donc encore un gros effort à faire de la part des consommateurs.

Source : AIB (pour l’année 2019)

L’Allemagne doit sa position de leader grâce à l’énorme quantité de GO importées. De fait, le mix de production allemand est encore caractérisé par les énergies fossiles, malgré une part de la production d’énergies renouvelables de 46%. Mais une grande partie de cette production émet des GO régionales non reconnues par l’AIB et intégrées dans le mix résiduel. Cela oblige les Allemands à importer des GO de l’étranger pour consommer de l’électricité verte. Selon l’AIB pour l’année 2019, sur les 96 TWh de Garanties d’Origine importées par l’Allemagne, environ 86 TWh sont de sources hydrauliques. La France et la Norvège étant les principaux exportateurs de GO hydrauliques, nous pouvons en déduire que ceux-ci sont les principaux fournisseurs de GO en Allemagne, lui permettant de pouvoir conserver une grande part d’énergies fossiles et de conserver ses GO régionales. Pour éviter ce type de situation, il est nécessaire que ces pays exportateurs utilisent les GO émises dans leur pays. L’Allemagne serait donc contrainte à remplacer sa production d’énergie fossile par du renouvelable ou à remplacer ses GO régionales par des GO EECS (standard AIB)


Bilan des énergies renouvelables en France en 2019

Comme chaque année depuis 2013, Observ’ER publie un baromètre de l’électricité provenant des énergies renouvelables en France pour l’année écoulée. Les données s’arrêtent au 30 septembre 2019. Comment se portent les différentes filières ? Allons-nous atteindre les objectifs définis par la PPE (Programmation Pluriannuelle de l’Énergie) ? Ce rapport tente de donner des éléments de réponses.

La capacité d’énergies renouvelables installées en France au 30 septembre 2019 a augmenté de 5,5% sur les douze derniers mois, passant de 51 128 MW à 53 918 MW. Ces installations ont permis de produire 111,14 TWh d’électricité verte sur cette période, représentant une hausse de 2,8% par rapport à 2018.

Source Observ’ER

L’éolien terrestre continue sa croissance avec une augmentation de 12% de la capacité de production pour atteindre les 16 GW installés et ainsi valider les objectifs de la PPE de 2016 (15 GW en 2018). Le secteur reste aussi sur la même cadence que les trois années précédentes qui avaient enregistré une hausse moyenne de 1,6 GW par an (+1,7 cette année). Néanmoins, il faudrait une augmentation de la capacité de production de 2 GW par an pour répondre aux objectifs fixés par la nouvelle PPE en 2023 (24,1 GW).

Le parc photovoltaïque peine quant à lui à accélérer sa croissance avec seulement 7,9% de capacités de plus que 2018 (+10,7% en 2018 ; +13,2% en 2017) et 9 649 MW installés. Les objectifs sont pour le moment loin d’être atteints puisque la PPE de 2016 avait fixé 10 200 MW pour fin 2018. Les nouveaux objectifs pour 2023 sont de 35,6 GW minimum, ce qui demanderait une augmentation de 2 GW par an dès 2019. Depuis 2013, la filière n’augmente que de 700 à 1000 MW par an.

La filière hydraulique reste la principale source de production d’énergie renouvelable. Elle n’a en revanche pas d’objectif particulier, si ce n’est la maintenance des barrages. La biomasse est elle principalement utilisée pour la production de chaleur. Elle est très peu présente dans le secteur de l’électricité : 632 MW installés et un objectif de 800 MW pour fin 2023.

Source Observ’ER

Les nouveaux paliers fixés par la dernière PPE sont ambitieux au regard de la situation actuelle et de l’évolution du mix de production sur les dernières années. La France va devoir accélérer sa transition énergétique notamment dans les secteurs éoliens et photovoltaïques afin d’y parvenir. Mais l’État, et donc les contribuables, risque de payer cette ambition au prix fort sans un signal positif des consommateurs.

Quel bilan des enchères de GO ?

Depuis cinq mois maintenant, l’Etat français met aux enchères les Garanties d’Origine émanant de la production d’électricité des centrales bénéficiant de subventions, soit de l’obligation d’achat, soit du complément de rémunération. C’est ainsi que la DGEC a tenté de maximiser le profit de l’Etat en ayant une stratégie de mise en vente progressive des volumes produits. Cette stratégie est déployée par l’utilisation de deux leviers : le prix de référence et la mise sur le marché de volume à sa convenance.

Si le prix de référence a toujours été caché, il s’est révélé au cours des enchères relatives à la production du mois d’octobre 2019. Sur les 2 TWh mis en vente, seuls 800 GWh ont trouvé preneurs. Et ce pour la simple raison que les offres d’achat proposées en dessous de 0,10€/MWh n’ont pas été satisfaites. Pour ce qui est des volumes mis en vente jusqu’alors, l’Etat a systématiquement proposé que 50% des volumes produits, le reste étant donc valorisé à 0€ et non utilisé.

A ce stade, nous vous proposons un bilan de cette décision de mise aux enchères de Garanties d’Origine.

Sur les cinq sessions d’enchères concernant huit mois de production d’électricité, l’Etat a réalisé un gain de 4.9 millions d’euros pour un volume total vendu de 13 TWh. Cela représente donc un prix moyen de 0,37€/MWh. Le prix moyen diffère d’une technologie à l’autre : 0,50€/MWh pour le solaire, 0,38€/MWh pour l’éolien, 0,30€ pour l’hydraulique et 0,28€/MWh pour la biomasse. Nous pouvons voir une nette baisse des prix à partir du mois d’avril, mois qui s’est révélé en forte hausse par rapport au mois de mars.

La forte différence entre les mois de mars et d’avril s’explique par le mécanisme de soutien aux énergies renouvelables au Royaume-Uni. Les mécanismes du « non-UK FIT » et « non-UK CfD » font bénéficier aux fournisseurs anglais un remboursement de taxe en cas d’utilisation de certaines GO provenant d’autres Etats membres. Ils ont ainsi créé un appétit pour les GO françaises, en particulier pour le solaire et l’éolien, d’où l’atteinte de prix supérieur à 1€/MWh. Il ne s’agissait donc pas de préférence de technologie en soit. La raison expliquant l’intérêt des fournisseurs d’outre-manche fut que l’éolien et le solaire français étaient pour la plupart des installations de moins de 5 ans et d’une puissance installée inférieure à 5MW, critères d’éligibilité à l’exemption de taxe. Cet effet d’aubaine s’est fait moins ressentir pour finalement disparaître à la suite de l’annonce de l’Ofgem, le régulateur anglais, de ne pas reconnaître ces GO françaises comme éligibles aux mécanismes.

A partir du mois de juillet, le prix des GO françaises s’est aligné sur les prix européens tout en continuant à faire baisser ces derniers en raison de l’importante offre apportée au marché européen par l’Etat français.

En guise de bilan, nous pouvons souligner la bonne réalisation des enchères et les importants volumes qui ont été vendus. Le prix moyen de vente reste très bas et en baisse. Nous pouvons enfin constater que les prix d’achat proposés par les acteurs du marché sont désormais majoritairement en dessous du prix de réserve.

Focus sur l’Espagne : futur roi du sans-subvention

En 2018, la production d’énergies renouvelables sans subvention en Europe représentait 588 TWh, soit environ 47% de la production totale d’énergies renouvelables[1]. L’Espagne produisait alors 29 TWh d’électricité verte sans subvention, sur une production totale d’EnR de 100 TWh, selon RECS International.

Le pourcentage (faites le calcul) est donc faible comparé par exemple à la France qui produisait la même année 57% de son électricité verte sans subvention, grâce aux barrages hydrauliques. Mais selon ICIS[2], l’Espagne est le leader de ce marché en termes de nombre de projets en cours et de leur capacité totale annoncée. Le coût de production de ces énergies, notamment solaires, étant l’un des plus faibles dans le pays, cela permet l’émergence de nombreux projets.

Source : ICIS

Les producteurs ont ainsi recours à des PPAs (Power Purchase Agreement) avec d’autres acteurs, comme des fournisseurs ou des entreprises grosses consommatrices d’électricités. Cela leur permet d’avoir des revenus minimums assuré et de rembourser les intérêts des emprunts bancaires, généralement sur 10 ans. En effet, les parties du contrat peuvent alors convenir d’un prix fixe ou même d’un contract-for-difference (Cfd). Dans ce dernier cas, l’accord financier consiste à payer la différence entre le prix fixe convenu et un indice reflétant la valeur du prix spot de l’électricité. Cela signifie que lorsque le prix du marché est supérieur au prix convenu, le producteur rembourse la différence au partenaire, et inversement lorsque le prix du marché est inférieur au prix convenu.

En Espagne, les PPAs avec les fournisseurs sont de plus en plus populaires. Ils proposent des revenus suffisamment stables pour investir et le processus de contractualisation est plus rapide. Les fournisseurs peuvent en effet assumer les risques plus facilement grâce à leur portefeuille déjà existant sur le marché. Mais ces fournisseurs développent aussi leurs propres centrales de productions avec leurs propres fonds, leur permettant de vendre en direct leur électricité sur le marché.  

Barcelone

Pourquoi la production d’électricité de source solaire devient rentable en Espagne ? Premièrement, le prix de marché de la responsabilité d’équilibre permet d’offrir une rémunération acceptable de l’électricité produite ce qui donne une bonne base pour la négociation de contrat long terme. Par ailleurs, la consommation volontaire d’électricité d’origine renouvelable est bien plus importante qu’en France par exemple. Le taux d’utilisation de Garanties d’Origine sur la consommation totale d’électricité était 26,9% contre 7,4% en France en 2018, selon l’AIB. L’origine de l’électricité ayant davantage de valeur pour les consommateurs, la production électrique provenant d’installations solaires peut se voir être mieux rémunérée qu’une production plus émettrice de gaz à effet de serre. Les signaux sont donc au vert et les investissements fleurissent.

La France quant à elle profite pour le moment de ces barrages hydrauliques. Mais les nouvelles technologies restent encore dépendantes des subventions sauf de très rares exceptions. La consommation d’électricité d’origine renouvelable restant encore trop faible, les investissements ne voient pas voir le jour.


[1] https://www.recs.org/assets/doc_4465.pdf

[2] https://www.icis.com/explore/resources/news/2019/09/09/10415456/power-perspective-subsidy-free-renewables-in-europe-market-data-and-outlook

L’Europe à la COP 25 : entre Pacte Vert et énergie nucléaire

En marge de la COP 25 gouvernée par le Chili et qui s’est déroulée du 2 au 13 décembre en Espagne, l’Europe s’est montrée entreprenante. L’urgence climatique a été votée et mise sur papier à travers la rédaction d’un Pacte Vert visant à augmenter les actions et atteindre la neutralité carbone en 2050. Il a aussi été décidé que l’énergie nucléaire serait incluse dans le mix énergétique européen pour répondre aux enjeux climatiques. Enfin, la France sera encore plus au cœur du réseau électrique européen avec l’ouverture de nouvelles interconnexions.

Le Pacte Vert a pour objectif de développer une économie et une société durables et saines pour l’environnement, en prenant en compte tous les acteurs y compris les citoyens. Il présente une première feuille de route des différentes actions et règles à mettre en place. Concernant l’énergie, l’Europe rappelle que le réseau électrique doit être majoritairement alimenté par les énergies renouvelables, en complément d’une sortie rapide des énergies fossiles. L’Europe insiste par ailleurs sur l’importance du développement de l’éolien off-shore. Aussi, pour que chacun puisse avoir de l’énergie à prix abordable et en toute sécurité, le marché européen doit être entièrement intégré, interconnecté et digitalisé. Enfin, l’UE attend la révision des plans énergétiques et climatiques des pays membres d’ici la fin de l’année 2019. Ceux-ci doivent être ambitieux et répondre aux nouveaux objectifs européens. L’Europe se permettra de réviser ces plans s’ils ne les considèrent pas suffisants. Il faut savoir que la Pologne est pour le moment le seul pays à être en désaccord avec ce Pacte, elle qui a un mix de production dominé à plus de 76%[1] par le charbon.

Lors de la Conférence des Nations Unies, l’Europe s’est résignée à inclure le nucléaire dans la transition énergétique. En effet, le Parlement « estime que l’énergie nucléaire peut contribuer à atteindre les objectifs en matière de climat dès lors que c’est une énergie qui n’émet pas de gaz à effet de serre, et qu’elle peut également représenter une part non négligeable de la production électrique en Europe ; considère néanmoins qu’en raison des déchets qu’elle génère, cette énergie nécessite une stratégie à moyen et long terme qui tienne compte des avancées technologiques (laser, fusion, etc.) visant à améliorer la durabilité du secteur »[2]. Aucune feuille de route n’a été proposée à ce sujet pour le moment. De leur côté, les énergies renouvelables devront correspondre à 32% du mix d’ici 2030, mais le Parlement incite le Conseil et la Commission à prendre des mesures additionnelles.

A côté des différentes annonces, la Commission Européenne a accepté de subventionner une nouvelle interconnexion entre la France et l’Irlande, permettant à l’Irlande de ne plus être dépendante du Royaume-Uni. La mise en service est prévue pour 2026 et devrait coûter 930 millions d’euros, sachant que l’Europe participerait à hauteur de 530 millions d’euros. Cette nouvelle confirme la volonté de l’Europe à créer une « solidarité électrique », où aucun pays n’est mis de côté et qui devrait favoriser le développement des énergies renouvelables. En effet, chaque état membre doit augmenter sa capacité d’interconnexion à l’étranger pour atteindre au moins les 15% de sa puissance installée d’ici 2030. La France tient ici un rôle majeur : elle sera donc connectée à un septième pays et quatre autres interconnexions sont en projet et validées par l’UE – deux avec le Royaume-Unis, une avec l’Espagne et une avec l’Italie.

La France doit maintenant confirmer sa place forte en devenant l’un des principaux pays consommateurs d’électricité verte du continent.


[1] https://www.aib-net.org/sites/default/files/assets/facts/residual-mix/2018/AIB_2018_Residual_Mix_Results_1_4.pdf

[2] https://www.europarl.europa.eu/doceo/document/TA-9-2019-0079_FR.html